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Camille Dusséaux, par monts et par vaux

Quantifier l’altitude d’une chaine de montagne érodée, grâce à la composition d’eaux de pluie vieilles de 300 millions d’années parait éminemment poétique pour beaucoup. Pas pour Camille Dusséaux, qui a utilisé la méthode de "paleoaltimétrie par les isotopes stables" au cours de sa thèse sur la chaîne Varisque. Aujourd’hui enseignante-chercheuse en géologie à l’université de Franche-Comté, elle forme à l’INSPE les futurs enseignants. Rencontre.

D’où viens-tu ? Quelle est ta formation ?
Je viens de Lezennes, un village du Nord (59) connu pour son dédale de carrières souterraines de craie ayant servi à construire la citadelle de Lille. Passionnée par les sciences de la Terre, j’ai obtenu une licence en géosciences à Lille en 2013. Après un cours en ingénierie sismique et ingénieurerie des tremblements de terre en Islande, j’ai déménagé à Montpellier pour suivre un master Exploration et Réservoirs, que j’ai notamment aimé pour ses nombreux stages sur le terrain. Je me suis ainsi spécialisée en géologie structurale et j’ai choisi un stage sur la tectonique Archéenne en Afrique du Sud. En 2016, j’ai décroché une bourse pour effectuer mon doctorat à l’université de Plymouth en Angleterre où j’ai étudié la chaîne Varisque dans le Massif Armoricain et le Massif Central grâce à la géochimie. En 2020, retour en France... à Besançon, où j’ai travaillé comme Attachée Temporaire à l’Enseignement et à la Recherche à l’université de Franche-Comté (voir Portrait d’une géologue) pendant un an. J’ai ensuite étudié l’hydrogène naturel au laboratoire ISTerre à Grenoble comme chercheuse post-doctorale. Enfin l’été dernier (2022), j’ai pu poser mes valises grâce au poste de maîtresse de conférences que j’ai eu le plaisir d’obtenir à Besançon.

Parle-nous de tes activités scientifiques
Mes intérêts scientifiques portent de manière générale sur les interactions eau-gaz-roches dans les granites. Pour étudier les circulations de fluides dans la croûte terrestre, j’effectue des analyses de terrain (échantillonnage de roches et de fluides, mesures des gaz, données structurales), pétrostructurales, géochimiques (MEB-EDS, EPMA, DRX, EBSD, séparations minérales), isotopiques (δD et δ18O), géochronologiques (Ar/Ar, U-Th-Pb), et des expériences d’altérations hydrothermales expérimentales en autoclave.
Ces analyses permettent premièrement, de mieux comprendre les interactions entre tectonique, topographie et climat, notamment les relations entre développement des plateaux orogéniques et changements climatiques. Pendant ma thèse en Angleterre, j’ai ainsi pu contraindre la composition isotopique en surface des eaux de pluie de la fin du Carbonifère en Bretagne et dans le Limousin pour reconstituer l’altitude de la chaîne Varisque il y a 300 millions d’années. À cette période, juste avant les premiers dinosaures, tous les continents étaient rassemblés et formaient la pangée. Quantifier les variations de l’altitude de la chaîne Varisque qui s’élevait au milieu de ce supercontinent permet de mieux comprendre les bouleversements climatiques et biotiques étant survenus à cette époque.
Je contribue aussi à l’évaluation du potentiel économique de l’hydrogène et de l’hélium naturels en étudiant leur source, leur distribution et leur migration en Corse, en Russie et plus récemment autour de Besançon. J’intègre des données géophysiques, géochimiques, structurales, modélisation et expérimentales pour construire des modèles de migration des gaz de leur génération en profondeur jusqu’à leur émanation en surface. J’étudie en parallèle les relations entre déformation et circulation de fluides (eau, gaz...) étant responsable de la mise en place de gisements métallifères en contraignant la source des fluides minéralisateurs et en estimant le calendrier, la durée et les mécanismes des interactions fluide(s)/roches associées.

Trois publications significatives
- Dusséaux C., Gébelin A., Boulvais P., Ruffet G, Poujol M., Cogné N., Branquet Y., Mottram C., Barou F., Mulch A. (2022) Timing and duration of meteoric water infiltration in the Quiberon detachment zone (Armorican Massif). Journal of Structural Geology, vol. 156, 104546.
- Dusséaux C., Gébelin, A., Ruffet, G., Mulch, A. (2021) Late-Carboniferous elevation of the Variscan Belt of Western Europe. Earth and Planetary Science Letters, vol. 569, p. 117064.
- Dusséaux C., Gébelin A., Boulvais P., Gardien V., Grimes S., Mulch A. (2019) Meteoric fluid-rock interaction in Variscan shear zones. Terra Nova, vol. 31, i. 4, p. 366-372.

Sélection de publications :
31 ans
2009 - Baccalauréat scientifique
2013 - Licence Terre et environnement - Université de Lille
2013 - Cours en ingénierie sismique et tremblements de terre - University of Iceland
2015 - Master Géologie des Réservoirs et de l’Exploration - Université de Montpellier
2019 - Doctorat en tectonique et géochimie - University of Plymouth, Angleterre
2019 - 2020 - Teaching Assistant - University of Plymouth, Angleterre
2020 - 2021 - A.T.E.R. - Université de Franche-Comté
2021 - 2022 - Post-doctorat - ISTerre, Université Grenoble Alpes
2022 - Maîtresse de conférences - Université de Franche-Comté

publié le